Avec plus de 4.500 petites capitalisations très peu étudiées à disposition, notre univers d’investissement regorge d’entreprises extrêmement compétitives
Q : A quoi ressemble l’univers mondial des petites capitalisations ?
Cet univers se compose d’un très grand nombre de titres, ce qui signifie qu’ils sont individuellement méconnus des analystes. Notre indice de référence, l’indice MSCI World Small Cap, regroupe environ 4.500 entreprises. Cette caractéristique est importante car l’univers des grandes capitalisations est comparativement plus restreint et le niveau de suivi de ses valeurs est dès lors beaucoup plus élevé. De l’insuffisance des recherches dans les petites capitalisations résulte une moindre efficience de leur marché, ce qui offre davantage de possibilités d’acquérir des titres mal valorisés.
Q : Pouvez-vous expliciter les avantages à investir dans des titres peu suivis ?
Prenons l’exemple de Microsoft. Plus de 40 analystes couvrent ce seul titre, mais deux seulement suivent la PME californienne WD-40 qui produit des articles ménagers, parmi lesquels sa marque vedette de lubrifiants. Cela constitue pour nous une opportunité de génération d’alpha accrue. En outre, la composition des portefeuilles peut s’écarter sensiblement de celle de l’indice de référence, ce qui signifie que nous avons accès à des opportunités de génération d’alpha qui sont clairement supérieures aux performances auxquelles peuvent prétendre les ETF passifs adossés à un indice de référence. Peu de classes d’actifs permettent d’avoir une part active aussi élevée.
Q : Quels sont les autres thèmes présents dans le fonds ?
Les petites capitalisations permettent d’obtenir une exposition exclusive à des tendances séculaires ou des thèmes en plein essor. On y trouve des entreprises qui se concentrent sur un seul métier et y excellent. Freshpet, par exemple, est une entreprise américaine qui produit des aliments frais de qualité pour les chiens et les chats. Les consommateurs américains dépensent chaque année 4% à 5%1 de plus pour leurs animaux de compagnie qu’ils ont de plus en plus tendance à traiter comme des membres de la famille. Mais si vous souhaitez investir dans cette tendance par le biais d’une société plus importante, il faudra sans doute vous tourner vers des entreprises comme Nestlé, pour laquelle les aliments pour animaux domestiques ne représentent qu’environ 10% du chiffre d’affaires.
Q : Quelles sont les caractéristiques que vous recherchez dans une entreprise ?
Pour faire simple, lorsqu’une entreprise dispose d’un avantage concurrentiel solide et durable, elle peut dégager un rendement du capital investi supérieur à son coût du capital pendant longtemps. Ainsi, si vous déteniez l’unique boulangerie d’une ville, vous auriez l’avantage concurrentiel suprême, c’est à dire aucun concurrent et la possibilité de fixer le prix du pain comme vous l’entendez. Mais en réalité, il y a beaucoup de boulangers et peu de barrières à l’entrée dans le secteur de la boulangerie, d’où l’absence d’avantage concurrentiel et un prix du pain peu élevé.
Le même principe s’applique aux entreprises que nous jugeons les plus attrayantes. Si nous décelons une entreprise bénéficiant d’un avantage concurrentiel pérenne, celle-ci peut maintenir des rendements supérieurs au coût du capital, année après année. Ce sont ces entreprises qui nous permettent de générer de l’alpha.
Q: Comment évaluez-vous si la compétitivité d’une entreprise est durable ?
Nous évaluons les caractéristiques fondamentales d’une entreprise et tentons de comprendre pourquoi elle maintiendra un rendement supérieur à son coût du capital sur le long terme. Pour nous aider à comprendre ce qui fait la force d’une entreprise par rapport à ses concurrents, nous utilisons le modèle des « Cinq forces de Porter », un ensemble d’outils destinés à évaluer l’avantage concurrentiel d’une entreprise.
Trex, une société qui fabrique des planchers composites (un revêtement mélangeant plastique et bois) constitue un bon exemple d’entreprise dotée d’un atout concurrentiel solide, protégé par des barrières à l’entrée élevées. Trex reçoit la totalité de son approvisionnement en résine plastique sous forme de billes, transformées dans un centre de tri du plastique, distant de quelques kilomètres, qui recycle des sacs en plastique provenant de grands détaillants américains. Il est extrêmement compliqué de reproduire ce procédé à un coût aussi peu élevé que celui dont bénéficie Trex, et, partant, très ardu d’imiter la fabrication des revêtements composites. Trex dispose ainsi d’un énorme avantage en termes de coûts – sur le long terme – dans un marché qui présente des marges extrêmement minces.
Q : L’approche a-t-elle évolué depuis votre prise de fonction comme gérant principal du fonds en avril 2019 ?
La philosophie d’investissement n’a pas changé et j’ai poursuivi le processus. Nous accordons sans doute plus d’importance aux facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG), notamment en utilisant notre propre système de notation de l’investissement responsable (IR). Lorsqu’une entreprise obtient une note médiocre dans ce domaine, nous collaborons avec notre équipe IR pour en analyser les raisons – l’IR et les facteurs ESG sont au centre de nos préoccupations. Une fois que nous avons déterminé la raison, nous pouvons discuter directement avec l’entreprise concernée afin de vérifier si le problème est traité. D’où l’importance du dialogue. Nous tenons compte des facteurs ESG car nous sommes convaincus qu’ils renforcent la compétitivité d’une entreprise sur le long terme.
Q : Quels sont vos atouts sur ce marché ?
Pour nous, il est essentiel d’avoir accès aux marchés locaux et de mener une recherche fondamentale. En effet, en raison du grand nombre d’actions disponibles (dont 30% des entreprises hors indice de référence), nous devons opérer une sélection pour aboutir à un portefeuille de 70 à 90 entreprises correspondant à notre philosophie d’investissement. La clé de notre succès réside dans le fait que nos analystes comptent jusqu’à 25 ans d’expérience dans les petites capitalisations régionales, tous partageant la même philosophie d’investissement. Nous disposons d’équipes régionales spécialisées dans les petites capitalisations aux Etats-Unis, en Europe et au Royaume-Uni, ainsi que des analystes de portefeuille en Asie. Leurs meilleures idées viennent enrichir la stratégie.
Q : De quels autres facteurs tenez-vous compte pour gérer le fonds ?
Nous accordons également beaucoup d’intérêt aux investissements à long terme. La période de détention moyenne d’un même titre est d’environ deux ans et demi, mais il y a beaucoup d’entreprises qui font partie du portefeuille depuis plus de quatre ou cinq ans. D’ailleurs, les titres qui ont le plus fortement contribué à la performance, et de loin, figurent dans le portefeuille depuis plus de quatre ans. Selon nous, les valeurs détenues pendant plusieurs années sont celles qui génèrent le plus d’alpha. C’est pourquoi nous essayons d’évaluer les perspectives d’une entreprise à un horizon de cinq ans, voire dix ans. Les entreprises que j’ai identifiées en 2016 arrivent à maturité. Les plus performantes d’entre elles sont parfois tellement prospères qu’elles deviennent trop importantes pour rester dans notre univers.
Je me plais à penser que la construction d’un portefeuille s’apparente à l’élaboration d’un album de compilation des plus grand succès. Nous ne sommes pas à court d’idées pour investir, bien au contraire.